La série Becoming Karl Lagerfeld, une expo sur l’exil, un roman sur la transmission... La semaine culture de Madame Figaro (2024)

ParMarion Géliot, Joseph Ghosn et Minh Tran Huy

Publié

La série Becoming Karl Lagerfeld, une expo sur l’exil, un roman sur la transmission... La semaine culture de Madame Figaro (1)

Une série, une expo, un roman: l'essentiel à voir et à écouter conseillé par la rédaction cette semaine.

Becoming Karl Lagerfeld, amour, gloire et couture

Raconter sa vie en série s’annonçait risqué tant Karl Lagerfed était déjà connu sous toutes les coutures. Mais en choisissant de dépeindre l’artiste à travers son histoire d’amour avec Jacques de Bascher, les créatrices de Becoming Karl Lagerfeld ont visé juste. L’histoire commence à Paris au printemps 1972. Alors inconnu du public, Karl Lagerfeld a 38 ans et rêve d’une carrière aussi flamboyante que celle de son ami Yves Saint Laurent. Obsédé par la réussite, il fait le succès de la maison Chloé et use de stratagèmes pour gravir les échelons. Dans son ombre, le jeune dandy Jacques de Bascher, auteur à ses heures perdues, tente de se faire une place légitime dans le monde de l’aristocratie, mais aussi dans le cœur de son designer allemand. Au-delà de sa narration rythmée et documentée, la série repose sur le choix audacieux de ses acteurs. Daniel Brühl irradie dans le rôle du Kaiser, au côté de Théodore Pellerin, formidable amant mal aimé. Face à eux, Arnaud Valois réussit son incarnation de Saint Laurent (une tâche difficile après les interprétations remarquées de Pierre Niney et de Gaspard Ulliel au cinéma) et Alex Lutz convint en Pierre Bergé. Verdict? Becoming Karl Lagerfeld surprendra les érudits et cultivera les novices. M. G.

Becoming Karl Lagerfeld, une série créée par Isaure Pisani-Ferry, Jennifer Have et Raphaëlle Bacqué, avec Daniel Brühl, Alex Lutz, Théodore Pellerin, Agnès Jaoui… Le 7 juin sur Disney+.

À Venise, les fantômes de l’exil

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Dites-moi qui vous hante, je vous dirai qui vous êtes. C’est un peu le propos de Your Ghosts Are Mine, qui, dans le off de la Biennale de Venise, fait office de diamant noir: occupant tout le Palazzo Cavalli, sous le commissariat du français Matthieu Orléan (affilié à la Cinémathèque française, et dont on avait pu voir la belle expo sur les scrapbooks de cinéastes, l’été dernier, à Arles), cette exposition propose une longue plongée dans des réalisations qui se font écho en montrant chacune des expériences d’exil, de contraintes, de déplacements, de passages de vie. Sa singularité est que ces œuvres sont issues de films de cinéma ou d’installations vidéo réalisés par des artistes issus de pays comme le Liban, l’Iran, la Thaïlande, l’Éthiopie, le Maroc, la Mauritanie…, et produites, au moins en partie, par les institutions du Qatar (Le Doha Film Institute) ou issues des collections de ses musées (Mathaf, le musée d’art contemporain du pays, ou le futur Art Mill Museum), qui déploient ici une démonstration de soft power culturel impressionnante. Montrés dans des pièces thématiques, par extraits et selon des dispositifs qui en soulignent les domaines communs, souvent sur plusieurs écrans en même temps, les films s’en trouvent renouvelés, regardés différemment. En cela, l’impression est forte de regarder des films comme on vit désormais, en passant d’un écran à l’autre, en juxtaposant une idée à une prochaine, un sentiment au suivant. Qu’est-ce qui constitue le sens du monde désormais, sinon la façon dont les choses les plus inattendues se hantent entre elles? L’exposition déploie ainsi une cartographie mouvante d’un monde en devenir, trouble et troublé par ses propres mouvements. Ses images hantent, longtemps. J. G.

Your Ghosts Are Mine. Expanded Cinema, Amplified Voices, jusqu’au 24 novembre, au Palazzo Cavalli-Franchetti, à Venise. labiennale.org/en

Une fresque sur la transmission et la mémoire

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Dans son cinquième roman, lauréat du tout nouveau Prix littéraire des étudiants de Sciences Po, qui récompense un ouvrage de fiction de langue française permettant de «comprendre notre temps», l’auteure camerounaise Hemley Boum, entrelace deux histoires. D’une part, celle de Zacharias, pêcheur de Campo, un village au bord du golfe de Guinée, qui mène avec sa femme Yalana et leurs deux filles une existence paisible. Mais un jour une compagnie forestière vient s’installer et détruit, sous couvert d’apporter la modernité, le mode de vie traditionnel des villageois avant de les ruiner. D’autre part, celle de Zachary, jeune garçon évoluant dans un quartier populaire de Douala avec ses amis Achille et Nala, qui, à 18 ans, coupe les ponts avec tous. Il prend l’avion pour Paris, où il devient psychologue clinicien, épouse Julienne, bientôt enceinte de jumelles, avant que le drame d’un de ses patients ne l’amène à revenir sur ses pas. C’est que Zacharias et Zachary n’ont pas que leur nom en commun, ils sont du même sang (le premier est le grand-père du second) et à plusieurs décennies de distance partagent un même mal-être: tous deux rêvent d’ailleurs et s’exilent après un terrible drame… Fresque riche en échos, aux descriptions superbes et aux motifs savamment tressés, Le Rêve du pêcheur explore d’une plume travaillée, aux accents à la fois poétiques et politiques, tant les fêlures les plus intimes que les bouleversem*nts collectifs. Tout au long de la saga familiale court, tel un fil de soie, une réflexion fouillée sur le silence et le secret, la transmission et la mémoire, les traumatismes transgénérationnels, mais aussi la possible réconciliation avec un monde où l’on s’est senti si longtemps, si intensément étranger. M. T. H.

Le Rêve du pêcheur, de Hemley Boum, Éditions Gallimard, 352 p., 21,50 €.

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